A. Des définitions

Qu'est-ce qu'une euthanasie ?
Une eutha­na­sie est un acte, pra­ti­qué par un tiers, qui met inten­tion­nel­le­ment fin à la vie d'une per­sonne à la demande de celle-ci. En Belgique, seul un médecin peut pra­ti­quer une euthanasie.
Qu’est-ce qu’un suicide médicalement assisté ?
Bien que notre loi ne parle pas de suicide médi­ca­le­ment assisté, il a été admis que lorsque le patient absorbe lui-même la potion létale ou tourne le robinet de la per­fu­sion, cette méthode soit assi­mi­lée à une eutha­na­sie pourvu que toutes les condi­tions prévues par la loi soient rem­plies, notam­ment que le médecin assiste le patient jusqu’à son dernier souffle. En d’autres mots, la seule dif­fé­rence réside dans la méthode.
Qu’est-ce qu’une sédation terminale ou une sédation profonde et continue ?
La séda­tion en tant que telle est un trai­te­ment médical qui répond à une situa­tion où les symp­tômes de dou­leurs se révèlent réfrac­taires à tout autre trai­te­ment et qui vise à induire l’inconscience du patient.

S’il s’agit d’une séda­tion ter­mi­nale, seuls seront encore admi­nis­trés les trai­te­ments visant à assurer un confort maximal au patient (anti­dou­leurs, anti-nauséeux, etc.) et seront sup­pri­mées l’alimentation arti­fi­cielle et l’hydratation (par­tiel­le­ment ou non). Cette solu­tion n’est pos­sible que pour des per­sonnes en extrême fin de vie.

Comme pour tout trai­te­ment, est exigé le consen­te­ment du patient. Si celui-ci n’est plus en état de le donner, il s’agit de se tourner vers le man­da­taire, l’administrateur de la per­sonne voire les repré­sen­tants légaux prévus par la loi sur les droits du patient.

Des abréviations
  • DAT : décla­ra­tion anti­ci­pée de refus de trai­te­ments (for­mu­laire blanc de l’ADMD)
  • DAE : décla­ra­tion anti­ci­pée rela­tive à l’euthanasie (for­mu­laire jaune de l’ADMD)
Qu'est-ce qu'une DAT ?
Déclaration par laquelle la per­sonne refuse anti­ci­pa­ti­ve­ment cer­tains trai­te­ments pour le cas où elle ne pour­rait plus s’exprimer. Elle peut y dési­gner un ou plu­sieurs man­da­taires qui, en signant ce docu­ment, acceptent de la repré­sen­ter pour l’exercice de ses droits du patient, notam­ment pour faire res­pec­ter ses refus de traitements.
Qu’est-ce qu’une DAE ?

Déclaration par laquelle un citoyen adulte demande anti­ci­pa­ti­ve­ment à béné­fi­cier d’une eutha­na­sie dans le cas où, atteint d'une affec­tion médi­cale grave et incu­rable, il devien­drait incons­cient et que sa situa­tion serait jugée irré­ver­sible selon l'état actuel de la science. Il peut y dési­gner une ou plu­sieurs per­sonnes de confiance.

Qu’est-ce qu’un mandataire dans une DAT ?

Le man­da­taire, désigné dans une DAT, est dans la capa­cité d’exercer les droits prévus par la loi sur les droits du patient au nom du mandant, le patient. Il pourra par exemple exiger que soit res­pecté un refus de trai­te­ment si son mandant, le patient, n’est pas ou plus en état de s’exprimer. Pour autant que le mandat soit clair, que les refus de trai­te­ments aient été iden­ti­fiés, le refus de trai­te­ment exprimé par le man­da­taire  devra être res­pecté par le médecin ou l’équipe soignante.

Qu’est-ce qu’une personne de confiance dans une DAE ?
La per­sonne de confiance, dési­gnée dans une DAE, pourra confir­mer la volonté de deman­der l’euthanasie dans l’hypothèse où le patient se trouve dans un état d’inconscience irréversible.
Qu’est-ce qu’un témoin dans une DAE ?
Par leur signa­ture, les témoins attestent que le requé­rant a rédigé une DAE libre­ment et de façon lucide. Il ne sera jamais fait appel à eux ultérieurement.

Il faut 2 témoins, dont l’un ne peut pas avoir d’intérêt maté­riel au décès du requérant.

B. Des confusions à éviter

Quelle est la différence entre une demande actuelle d’euthanasie et une déclaration anticipée d’euthanasie ?
Une demande actuelle d’euthanasie :

Une per­sonne consciente et lucide, pour autant qu’elle réponde aux cri­tères de la loi peut, à tout moment, deman­der une euthanasie.

La demande doit être répétée. Il est impor­tant d’en parler avec la famille, le médecin et l’équipe soi­gnante et de confir­mer la demande par écrit « Je, soussigné(e),…, demande l’euthanasie, Fait à … le … ». Cette demande écrite est à remettre au médecin qui doit la conser­ver dans le dossier médical du patient.

Si le patient ne peut plus écrire, il peut deman­der à une per­sonne (majeure et n’ayant aucun intérêt maté­riel à son décès) de rédiger la demande en pré­sence du médecin qui doit indi­quer la raison pour laquelle le patient n’a pas rédigé lui-même la demande.

Une déclaration anticipée d’euthanasie

Document par lequel une demande anti­ci­pée d’euthanasie (for­mu­laire de l’ADMD ou de la commune) est rédigée. Cette décla­ra­tion peut se faire dès la majo­rité d’une per­sonne, malade ou non, et qui demande qu’une eutha­na­sie soit pra­ti­quée dans le cas où, atteinte d'une affec­tion médi­cale grave et incu­rable, elle devien­drait incons­ciente et que sa situa­tion serait jugée irré­ver­sible selon l'état actuel de la science.
Une décla­ra­tion (ou un renou­vel­le­ment) signée à partir du 02/04/2020 est valable pour une durée indé­ter­mi­née. Attention une décla­ra­tion (ou un renou­vel­le­ment) signée avant le 02/04/2020 est valable 5 ans, il faut donc songer à la renouveler.

Attention : Tant que la per­sonne peut s’exprimer, c’est elle et elle seule qui demande (ou non) l’euthanasie.

Le décès suite à une administration de doses élevées de morphine ou de ses dérivés est-il une euthanasie ?

L’objectif premier de l’administration de mor­phine ou de ses dérivés est le sou­la­ge­ment de la douleur, même si elle pour­rait abréger la vie (« le prin­cipe du double effet ») et on ne sait pas avec pré­ci­sion quand la mort surviendra.

La mor­phine est contre indi­quée pour la pra­tique de l'euthanasie.

Qu'appelle-t-on suicide médicalement assisté ou suicide assisté ?

Par suicide médi­ca­le­ment assisté, l’on entend l’hypothèse où le patient absorbe lui-même la potion létale ou déclenche la per­fu­sion en pré­sence et sous le contrôle d’un médecin jusqu’au décès. La loi rela­tive à l’euthanasie ne pré­ci­sant pas la méthode par laquelle l’euthanasie doit être pra­ti­quée, le suicide médi­ca­le­ment assisté est assi­milé à l’euthanasie en Belgique.

Dans l'hypothèse où le médecin délivre la pres­crip­tion pour obtenir le sirop de bar­bi­tu­riques mais n’intervient plus dans la suite de la pro­cé­dure et n’est donc pas présent lorsque le patient déci­dera d’absorber la potion létale et décé­dera, l'on peut éga­le­ment parler de suicide (médi­ca­le­ment) assisté. Ceci n’est cepen­dant pas auto­risé en Belgique.

C. Divers

Existe-t-il un droit à l’euthanasie en Belgique ?
Il n’existe pas à pro­pre­ment parler un droit à l’euthanasie mais bien le droit de deman­der une eutha­na­sie, confor­mé­ment à la loi du 28 mai 2002. Le médecin pourra ou non accep­ter cette demande qui ne pourra jamais être expri­mée que par le patient.
L'euthanasie est-elle devenue un droit du patient ?

Non, mais la loi offre au patient la pos­si­bi­lité de for­mu­ler une demande d’euthanasie dans les situa­tions qu’elle précise et elle assure  une sécu­rité juri­dique au médecin qui la pra­tique en res­pec­tant les condi­tions légales.

Dans les situa­tions où l’euthanasie n’est pas pos­sible ou n’est pas sou­hai­tée, la loi rela­tive aux droits du patient peut éven­tuel­le­ment appor­ter une solu­tion : elle permet au patient de refuser un trai­te­ment qui pro­lon­ge­rait une fin de vie pénible ; elle permet aussi de prévoir un tel refus par une direc­tive anticipée.

Contrairement à la décla­ra­tion anti­ci­pée d’euthanasie, une telle direc­tive n’est pas soumise au for­ma­lisme de la signa­ture de deux témoins et peut être prise en consi­dé­ra­tion si le patient est inca­pable de s’exprimer sans être néces­sai­re­ment inconscient.

Tous les hôpitaux pratiquent-ils l’euthanasie ?

La loi du 15 mars 2020 prévoit la sup­pres­sion de toute clause écrite et non écrite entre un éta­blis­se­ment de soin et un médecin quant à l'interdiction pour ce dernier de pra­ti­quer une eutha­na­sie au sein de l'établissement. Théoriquement, il ne peut y avoir de clause de conscience ins­ti­tu­tion­nelle. Dans la pra­tique, on observe tou­te­fois que cer­tains hôpi­taux sont plus réti­cents que d’autres à per­mettre la pra­tique de l’euthanasie. Généralement mieux accep­tée dans les hôpi­taux publics que dans cer­taines ins­ti­tu­tions catho­liques, c’est surtout l’attitude per­son­nelle du médecin qui est à considérer.

La famille peut-elle s’opposer à mes décisions de patient ?

En prin­cipe, non. Il est tou­te­fois impor­tant d’établir un dia­logue patient/famille/médecin afin que chacun puisse vivre la situa­tion de manière apaisée.

Sur un plan psy­cho­lo­gique, une aide exté­rieure pro­fes­sion­nelle peut être néces­saire (médecin, psy­cho­logue, média­teur) pour aider à une meilleure com­pré­hen­sion de la déci­sion et des volon­tés du patient.

Dans quel ordre se fait la représentation du patient ?

Quand une per­sonne se retrouve dans l’incapacité de s’exprimer et aussi long­temps qu’elle n’est pas en mesure d’exercer ses droits elle-même, la loi rela­tive aux droits du patient prévoit un système de repré­sen­ta­tion pour exercer ses droits selon l’ordre suivant :

  1. un man­da­taire préa­la­ble­ment désigné par le patient, que ce soit par un acte sous seing privé ou par un acte notarié (mandat extrajudiciaire) ;
  2. un admi­nis­tra­teur de la per­sonne, désigné par le Juge de paix ;
  3. à défaut, selon la cascade suivante : 
    1. l’époux coha­bi­tant ou le par­te­naire coha­bi­tant légal ou de fait ;
    2. un enfant majeur ;
    3. un parent ;
    4. un frère ou une sœur majeur.

À défaut ou en cas de conflit, c’est le pra­ti­cien pro­fes­sion­nel concerné qui prendra la déci­sion, en concer­ta­tion plu­ri­dis­ci­pli­naire éventuellement.

Attention, lorsque, dans un cas d'urgence, il y a incer­ti­tude quant à l'existence ou non d'une volonté expri­mée au préa­lable par le patient ou son repré­sen­tant, toute inter­ven­tion néces­saire est pra­ti­quée immé­dia­te­ment par le pra­ti­cien pro­fes­sion­nel dans l'intérêt du patient.

Par ailleurs, dans l'intérêt du patient et afin de pré­ve­nir toute menace pour sa vie ou toute atteinte grave à sa santé, le pra­ti­cien pro­fes­sion­nel, le cas échéant dans le cadre d'une concer­ta­tion plu­ri­dis­ci­pli­naire, peut déroger à la déci­sion prise par le repré­sen­tant du patient SAUF si la déci­sion a été prise par un man­da­taire, et que celui-ci peut invo­quer la volonté expresse du patient.

Conclusion : mieux vaut pré­ci­ser, par écrit, le plus loin pos­sible ses volon­tés en matière de trai­te­ments tout en dési­gnant un mandataire.

La transplantation d’organes après euthanasie est-elle possible ?

Le premier cas de trans­plan­ta­tion d’organes après eutha­na­sie a eu lieu en 2005, à l’initiative d’un patient. La chose est pos­sible pour des patients atteints d’une affec­tion neu­ro­lo­gique ou de troubles psy­chia­triques, non pour des patients can­cé­reux. Les deux pro­cé­dures – eutha­na­sie et trans­plan­ta­tion d’organes – doivent être her­mé­ti­que­ment sépa­rées. Pour donner le maximum de chances à une trans­plan­ta­tion d’organes réussie, il faudra que l’euthanasie se déroule dans un hôpital uni­ver­si­taire com­pé­tent pour la trans­plan­ta­tion d’organes. Il s’agit donc que le patient soit dûment informé de ces condi­tions par­ti­cu­lières pour qu’il puisse, avec les siens, prendre les dis­po­si­tions pour l’éventuelle céré­mo­nie d’au revoir.

L’euthanasie (ou le suicide médicalement assisté) invalide-t-elle un contrat d’assurance-vie ?
Non. La loi du 28 mai 2002 le prévoit très clai­re­ment : l’euthanasie est consi­dé­rée comme une mort natu­relle.
Je suis non-résident, puis-je bénéficier de l’euthanasie en Belgique ?

La loi belge rela­tive à l’euthanasie n’impose pas de condi­tions ni de natio­na­lité, ni de rési­dence. Cela dit, il est évident que dans le respect de l’esprit de la loi, une rela­tion thé­ra­peu­tique pro­fonde avec un médecin belge est indis­pen­sable. Plusieurs séjours en Belgique seront éven­tuel­le­ment néces­saires sur la base d'un dossier médical éta­blis­sant l'affection grave et incu­rable, de s'assurer du carac­tère volon­taire, réitéré, de la demande sans pres­sion exté­rieure et des souf­frances inapai­sables. La rela­tion thé­ra­peu­tique ne peut pas se nouer autour de la seule ques­tion de l’euthanasie.

A l'heure actuelle, les méde­cins belges sont réti­cents lorsqu’il s’agit de prendre en charge des patients non-résidents et ce, en raison des dif­fi­cul­tés pra­tiques que ceci implique. Si la demande est causée par des troubles psy­chia­triques, un patient non-résident n'aura pra­ti­que­ment aucune chance d'être entendu, la demande d'euthanasie néces­si­tant un suivi de plu­sieurs mois, voire plus.

Il est conseillé dans un premier temps de prendre contact avec les asso­cia­tions qui se battent pour le droit de mourir dans la dignité dans son pays.