F.A.Q. : 3. De la demande actuelle d'euthanasie
Quelles sont les conditions essentielles pour qu’une euthanasie puisse être légalement pratiquée ?
- La demande doit être volontaire, réfléchie et répétée sans pression extérieure.
- Le patient doit se trouver dans une situation médicale sans issue à la suite d’une affection grave et incurable causée par un accident ou une maladie
- Le patient doit éprouver une souffrance physique et/ou psychique constante, insupportable et inapaisable causée par cette affection médicale.
Quelle est la procédure lors d’une demande actuelle d’euthanasie ?
- La première démarche à accomplir est de formuler la demande d'euthanasie auprès de son médecin.
- Celui-ci devra informer le patient de son état de santé, de son espérance de vie et des traitements à envisager, en ce compris les soins palliatifs et mener avec lui plusieurs entretiens,
- Le médecin devra s’entretenir avec l’équipe médicale ainsi qu’avec les proches désignés par le patient.
- Il devra obligatoirement consulter un autre médecin indépendant, par rapport à lui-même et par rapport au patient, dont la mission est de se prononcer sur le caractère grave et incurable de l’affection médicale et sur le caractère inapaisable des souffrances. Il s'agit du 1er avis.
- Si le décès n’est pas prévu à brève échéance (c'est-à-dire qu'il ne se produira pas dans l'année), le médecin devra obtenir un 2ème avis auprès d’un médecin spécialiste de la pathologie ou d’un psychiatre quant à la qualité de la demande du patient et du caractère inapaisable de ses souffrances. Un délai d’un mois devra alors être respecté entre la demande écrite et l’euthanasie.
- Si le patient et le médecin arrivent à la conclusion que l'euthanasie est la seule option raisonnable, ils conviendront de la date, du lieu et des diverses modalités.
- Le médecin se procure lui-même les produits auprès du pharmacien.
- Dans les 4 jours ouvrables qui suivent l’euthanasie, le médecin doit en faire la déclaration auprès de la Commission fédérale d’évaluation et de contrôle de la loi relative à l’euthanasie.
Faut-il l'accord d'autres personnes que le patient et son médecin ?
Les deux personnes à qui incombe la décision dans le cadre de l’euthanasie sont le patient qui la demande et le médecin qui y consent et la pratique. C’est à eux deux qu’incombe la décision.
L’entretien obligatoire du médecin avec les membres de l'éventuelle équipe soignante ainsi qu’avec les proches que le patient désigne, certes important, n’a cependant qu’une portée consultative.
Le médecin a également l’obligation de consulter un autre médecin quant au caractère grave et incurable de l'affection qui doit s'assurer du caractère constant, insupportable et inapaisable de la souffrance physique ou psychique.
Si le décès n'est pas prévu à brève échéance, il s’agit de consulter un second médecin, psychiatre ou spécialiste de la pathologie concernée, dont l’avis portera sur le caractère volontaire et lucide de la demande ainsi que sur le caractère insupportable et inapaisable des souffrances.
Comment se déroule un acte d’euthanasie proprement dit ?
Le patient aura préalablement choisi avec le médecin, en fonction de son état médical notamment, la méthode : par intraveineuse (par IV) ou par voie orale (per os). La date, l’heure, le lieu auront été convenus ainsi que les personnes qui assisteront à l’euthanasie : proches, infirmières, etc.
Jusqu’à la dernière minute, le patient peut changer d’avis.
Si le patient a choisi la voie veineuse, le produit sera administré soit par perfusion, soit par injection. La mise en place de la perfusion se fera à l’avance. Parfois le médecin administrera un sédatif pour induire une sédation préalable. Il administrera ensuite un barbiturique général pour induire le coma, ce qui provoque fréquemment le décès en quelques minutes. Si nécessaire, le médecin injectera un paralysant neuromusculaire pour arrêter la respiration. Le décès survient très rapidement, sans aucun signe de souffrance.
Si le patient a choisi la voie orale, il absorbera préalablement un antiémétique (1h avant l’euthanasie). Il boira ensuite la potion de barbituriques pour induire le coma, qui interviendra en général rapidement. Toutefois, il est parfois nécessaire que le médecin injecte un paralysant neuromusculaire pour arrêter la respiration, la voie orale étant plus lente que l’intraveineuse.
À qui la demande actuelle doit-elle être faite ?
En cas d’hospitalisation, le personnel soignant ou toute autre personne ayant entendu la demande du patient peut servir de relais et en faire part au médecin du service. Le médecin viendra en parler avec le patient et la demande sera enregistrée dans le dossier médical.
Au niveau de la forme, une demande écrite devra alors être remise au médecin.
Je suis dans l’incapacité physique de rédiger ma demande actuelle d’euthanasie. Que puis-je faire ?
A titre d’exemple : « Ce jour, M/Mme… qui est incapable d’écrire pour raisons médicales a exprimé sa demande d’euthanasie. Je la transcris à sa demande en présence du Dr….. Fait à …, le… Signature. »
Puis-je formuler ma demande actuelle d’euthanasie par une enregistrement audio ou vidéo ?
La demande du patient doit être actée par écrit. Le document doit être donc rédigé, daté et signé par le patient lui-même.
S'il n'est pas en état de le faire, que ce soit pour une raison médicale, pour une question d’analphabétisme ou encore d’expression dans une langue étrangère, sa demande est actée par écrit par une personne majeure de son choix qui ne peut avoir aucun intérêt matériel au décès du patient. Cette personne mentionne le fait que le patient n'est pas en état de formuler sa demande par écrit et en indique les raisons. La demande est alors actée par écrit en présence du médecin, le nom du médecin devant être mentionné dans le document.
L'expression de la volonté ne doit pas être nécessairement formulée par des mots. Il se peut aussi que la personne ne soit plus en état de formuler des mots mais bien de répondre par signes à des questions qui lui sont posées de manière claire, sans équivoque.
Certains médecins accompagnent la demande écrite d'un enregistrement vidéo, voire tiennent à faire un enregistrement vidéo le jour même de l'euthanasie pour acter la confirmation par le patient de sa demande. Il s'agit d'un élément de preuve complémentaire.
Un enregistrement audio peut aussi constituer un complément de preuves par rapport à cette demande formulée par le patient. Cela étant, parfois l'enregistrement audio ne constitue pas le moyen le plus efficace d'apporter une preuve. Se pose en effet la question notamment d'identifier la voix du demandeur, la date, le contexte, etc.
En conclusion, pour rester en conformité avec la loi relative à l'euthanasie, l'écrit doit être privilégié. Toute autre forme, que ce soit une vidéo ou un enregistrement audio, peut constituer un complément de preuve. Il s'agit cependant de rester attentif à un juste équilibre entre les conditions posées par la loi et la charge que l'on impose à un patient en multipliant les formalités.
Quelles sont les conditions spécifiques d’application pour une personne mineure qui demande l’euthanasie ?
Comme pour toute euthanasie, c’est le patient, donc en l’espèce, l’enfant qui doit faire la demande suite à des souffrances physiques causées par une maladie grave et incurable. Toutefois, ses parents devront donner leur accord.
Son décès doit être prévu à brève échéance.
Comme pour les adultes, l’avis d’un 2ème médecin indépendant (= 1er médecin consulté) sur les souffrances inapaisables, insupportables et constantes et sur l’affection grave et incurable est nécessaire.
Un psychologue ou un pédopsychiatre doit établir la capacité de discernement de l’enfant.
La possibilité d’établir une déclaration anticipée d’euthanasie n’est pas ouverte pour un mineur.
Que se passe-t-il en cas de maladie d’Alzheimer ou autre démence ?
Le patient doit être lucide et conscient et sa demande répétée, volontaire et réfléchie.
Le diagnostic ayant été posé, le patient peut entreprendre les démarches en vue de l’obtention d’une euthanasie. La mort n’étant en principe pas prévue à brève échéance, le médecin qui est prêt à pratiquer l’euthanasie devra consulter deux médecins indépendants, le second devant être un psychiatre voire un gériatre ou un neurologue.
En revanche, si le patient n’est plus conscient de lui-même, sans pour autant se trouver dans une situation d’inconscience irréversible, l’euthanasie ne peut être envisagée ni sur la base d’une demande actuelle, ni sur la base d’une déclaration anticipée.
Le cas de l’écrivain Hugo Claus qui a demandé et obtenu l’euthanasie en 2008 illustre la chose : il jouissait d’une lucidité suffisante et était donc capable au moment de la formulation de sa demande mais craignait, s’il tardait, de ne plus être en état pour formuler une telle demande.
Que faire dans les cas de « grand » âge ?
Le grand âge en tant que tel ne peut bien évidemment être considéré comme une affection médicale grave et incurable.
En revanche, une demande d’euthanasie peut être entendue en cas de polypathologies (conjugaison de maladies chroniques réfractaires) entraînant de grandes souffrances évidentes en diminuant de manière significative la qualité de la vie.
Dois-je aller chercher mes produits pour l’euthanasie à la pharmacie ?
Non. Seul le médecin peut se rendre à la pharmacie, muni d’une ordonnance au nom du patient et qui mentionne que la prescription est faite en application de la loi relative à l’euthanasie. C’est le médecin qui paie les produits à la pharmacie. Il lui appartient de demander (ou non) le remboursement par le patient ou la famille. L'ADMD ne peut en aucun cas fournir ces médicaments.
Pourquoi des patients demandent-ils l’interruption médicale de leur vie alors qu’il existe des soins palliatifs de qualité ?
La Belgique possède un système de santé qui garantit à chacun des soins de qualité et la possibilité de recourir aux soins palliatifs. Mais il existe des situations où le patient, en dépit de soins, même optimaux, ressent des souffrances, physiques ou psychiques, comme étant insupportables et souhaite qu’il soit mis fin à sa vie.
Les soins palliatifs sont très développés en Belgique. Ils peuvent être dispensés aux malades incurables soit à domicile ou dans une maison de repos et de soins, par le médecin traitant, une infirmière et une équipe de soins palliatifs, soit dans un hôpital, soit encore dans un centre de jour. Toutes ces modalités sont prises en charge, moyennant des conditions définies, par l’assurance maladie.