Législation belge : Euthanasie (synthèse)

ESSENTIEL DE LA LOI DU 28 MAI 2002 RELATIVE À L’EUTHANASIE (MONITEUR DU 22 JUIN 2002)

Définition

Acte pratiqué par un tiers qui met inten­tion­nel­le­ment fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci.

Pas d’infraction si :

Pratiquée par un médecin qui s’est assuré

  1. de ce qu’il s’agit d’une demande volon­taire, réflé­chie et répétée, sans pres­sion exté­rieure, émanant d’un patient compé­tent : majeur ou mineur éman­cipé, capable et conscient
  2. de ce que le patient éprouve une souf­france physique ou psychique inapaisable
  3. résul­tant d’une affec­tion incu­rable et grave (soit d’un acci­dent soit d’une maladie), situa­tion médi­cale sans issue

Si le patient est un mineur (depuis 2014) :

  • capa­cité de discer­ne­ment attestée par un pédo­psy­chiatre ou un psychologue
  • unique­ment souf­frances physiques prises en compte (= pas prise en compte d’affection psychiatrique)
  • unique­ment pour les cas où le décès est prévu à brève échéance
  • accord des parents ou toute autre personne exer­çant l’autorité parentale

Procédure :

  • recueillir la demande écrite du patient
  • informer le patient de son état de santé et de son espé­rance de vie, évoquer les possi­bi­lités théra­peu­tiques ou palliatives
  • arriver à la convic­tion qu’il n’y a aucune autre solu­tion raison­nable et que la demande du patient est entiè­re­ment volontaire
  • s’assurer de la persis­tance de la souf­france physique ou psychique et de la volonté réitérée du patient
  • consulter un autre médecin indé­pen­dant à l’égard du patient et du médecin trai­tant et compé­tent quant à la patho­logie concernée, qui prend connais­sance du dossier, examine le patient et rédige un rapport portant sur le carac­tère grave et incu­rable de l’affection médi­cale et le carac­tère inapai­sable des souffrances
  • en cas de décès non prévi­sible à brève échéance
    • consulter un 2e médecin indé­pen­dant, psychiatre ou spécia­liste de la patho­logie concernée qui donne son avis sur le carac­tère inapai­sable des souf­frances et sur la qualité de la demande
    • respecter un délai d’un mois entre la demande écrite et l’euthanasie
  • s’entretenir
    • avec l’équipe soignante si elle existe
    • avec les proches si telle est la volonté du patient
  • s’assurer que le patient a eu l’occasion de s’entretenir avec les personnes qu’il souhai­tait rencontrer
  • consi­gner tous les docu­ments dans le dossier médical

Clause de liberté de conscience : aucune personne n’est tenue de participer à une euthanasie

Aucun médecin n’est tenu de prati­quer une eutha­nasie, mais

  • refus de prin­cipe : doit en informer le patient ou la personne de confiance dans les 7 jours de la première formu­la­tion de la demande d’euthanasie ;
  • au cours de l’examen de la demande, pour raisons médi­cales : en temps utile
  • dans les deux cas :
    • trans­mis­sion du dossier médical au médecin désigné par le patient ou la personne de confiance dans les 4 jours
    • infor­ma­tion quant à un centre ou une asso­cia­tion spécia­lisée dans la ques­tion du « droit » à l’euthanasie

Contrôle a posteriori :

Le médecin doit trans­mettre dans les quatre jours ouvrables le docu­ment de décla­ra­tion de l’euthanasie prati­quée à la Commission fédé­rale d’évaluation et de contrôle de la loi rela­tive à l’euthanasie – CFCEE (www.commissioneuthanaisie.be)

La CFCEE comporte 16 membres (8 méde­cins, 4 juristes, 4 membres s’occupant de la problé­ma­tique des patients incurables).

Le médecin doit envoyer sa décla­ra­tion à la CFCEE dans les 4 jours ouvrables suivant l'euthanasie. Depuis la réforme du 27 mars 2024, l'anonymat a été levé. A souli­gner l'obligation de respecter le secret profes­sionnel qui pèse sur les membres de la CFCEE.

En cas de doute lors de l'examen de la décla­ra­tion, la CFCEE peut demander de compléter l'information, de commu­ni­quer des pièces du dossier médical, voire inviter le médecin à exposer le cas à une prochaine réunion.

Elle doit, en cas de viola­tion des condi­tions, après un vote à la majo­rité des 2/3, trans­mettre le dossier à la justice (Procureur du Roi).

Depuis la réforme intro­duite par la loi du 27 mars 2024, les manque­ments aux deux condi­tions essen­tielles étant l'affection grave et incu­rable et les souf­frances inapai­sables peuvent faire l'objet de sanc­tions pénales, à savoir la réclu­sion de dix ans à quinze ans. En cas de manque­ment à la condi­tion essen­tielle portant sur la demande, le droit commun s'applique : éven­tuel­le­ment incri­mi­na­tion de meurtre par empoi­son­ne­ment. En cas de manque­ment à la procé­dure de consul­ta­tion il est prévu un empri­son­ne­ment de huit jours à trois ans et une amende de 26 euros à 1.000 euros, ou d'une de ces peines seule­ment. Autrement, le droit civil et déon­to­lo­gique sont d'application.

La CFCEE a égale­ment pour mission de présenter tous les deux ans un rapport repre­nant les éléments statis­tiques, une descrip­tion de l'application de la loi ainsi que d'éventuelles recom­man­da­tions pour en améliorer l'application.

La déclaration anticipée d’euthanasie :

  • Toute personne peut consi­gner par écrit sa volonté qu’un médecin pratique une eutha­nasie si elle est atteinte d’une affec­tion acci­den­telle ou patho­lo­gique grave et incu­rable, qu’elle est incons­ciente et que cette situa­tion est irréversible
  • La décla­ra­tion peut dési­gner une ou plusieurs personnes de confiance char­gées de mettre le médecin au courant de la volonté du patient
  • Elle doit être dressée en présence de deux témoins majeurs dont l’un au moins ne peut pas avoir d’intérêt maté­riel au décès du patient
  • Elle doit être signée par le décla­rant, les témoins et la ou les personnes de confiance
  • Sa durée est illi­mitée (loi du 15 mars 2020) étant entendu que le requé­rant peut la modi­fier (par exemple personnes de confiance) voire la supprimer à tout instant
  • Le médecin doit agir comme en cas de demande d’un patient conscient

Conditions pour l’euthanasie sur la base d’une déclaration anticipée d’euthanasie

  • Patient atteint d’une affec­tion grave et incu­rable, d’ordre patho­lo­gique ou accidentel
  • Inconscient (nl : niet meer bij bewustzijn)
  • Situation irré­ver­sible selon l’état actuel de la science

Version 2024-06-03 J. Herremans

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